Essonne : le rappeur MIG jugé pour avoir partagé un tag antipolice et bloqué la rue lors d’un clip

“Défense de l’artiste Mig à l’occasion de sa comparution à l’audience du tribunal correctionnel d’Evry-Courcouronnes. Une affaire bien plus complexe qu’il n’y parait, pour laquelle le cabinet a développé de solides arguments de procédure et de droit. ” Damien Legrand

De son prénom, il a tiré un surnom, puis un nom de rappeur : MIG. Cela fait deux ans que la notoriété de Miguel D. a dépassé son quartier de Saint-Hubert, à Sainte-Geneviève-des-Bois (Essonne). À 20 ans, cette star montante du rap français cumule plus de 20 millions de vues sur la poignée de clips publiés sur sa chaîne YouTube. Ce jeudi, selon nos informations, MIG, aussi appelé à ses débuts « MIG Moula », comparaît au tribunal correctionnel d’Évry-Courcouronnes pour apologie de crime envers les forces de l’ordre et entrave à la circulation publique.

Selon une source proche du dossier, on lui reproche d’abord d’avoir repartagé une photo menaçante envers les policiers sur son compte Instagram fin 2020. Sur ce cliché figure un rideau métallique du quartier, sur lequel est écrit en noir : « Récompense assurée si tu brûle (sic) le Passat » et « Si un policier meurt, on double la paie », en référence à la voiture Volskwagen Passat utilisée par la brigade anticriminalité locale, et qui gêne les trafiquants au quotidien. MIG aurait partagé la photo et ajouté le commentaire « Bienvenue à Saint-Hubert ».

Le rappeur nie être l’auteur du message

Dans un département encore marqué par l’affaire de Viry-Chatillon (en 2016, une quinzaine de jeunes cagoulés avaient attaqué et brûlé deux voitures avec les policiers à l’intérieur), les menaces sont prises au sérieux. Auditionné, Miguel D. reconnaît être le détenteur du compte Instagram « mig_la6t ».

En revanche, il se défend d’être l’auteur de l’inscription et d’avoir incité au meurtre des forces de l’ordre. « Ce n’est pas de ma faute s’il y a ça de tagué dans la cité, balaie-t-il face aux enquêteurs. Ce n’est pas moi qui l’ai écrit, c’est comme si je prenais des photos de graffiti. Je ne l’ai pas dit pour faire de la publicité, mais pour dire : regardez comment les gens ici ils sont. Pour montrer qu’on n’est pas dans le 16e (arrondissement de Paris) ».

« Cette affaire est plus complexe qu’il n’y paraît », a réagi Me Damien Legrand, son avocat, contacté ce mardi.

Lors de son audition, l’enquêteur lui demande s’il connaît les marques des voitures de police banalisées dans son quartier. « Passat, 308, Skoda, énumère MIG. Après, vous en avez des cachées, peut-être. » Dans le clip de « Barbara Kean », qui culmine à plus de 7 millions de vues, une autre inscription sur le mur d’un hall a attiré l’attention des policiers : « Passat, 308 break, Opel Insigna ont (sic) vous voit ! ».

La prison comme image de marque

Une seconde affaire rattrape MIG. Le 14 juin 2021, lors du tournage du clip du morceau « Kuluna », avec le rappeur Da Uzi, il fait bloquer la circulation à un carrefour de Saint-Hubert avec une cinquantaine de jeunes. Les policiers interviennent vers 21 heures pour faire cesser le tournage, qui n’avait pas été déclaré. Ils y parviennent à 23 heures, au terme d’un affrontement durant lequel deux agents ont été blessés à l’épaule et la cheville par des jets de pavé.

Pour MIG, la prison s’est muée en argument marketing. Le 30 septembre 2021, il publie un dernier « freestyle » avant de rejoindre Fleury-Mérogis le lendemain afin de purger une peine de 14 mois de prison ferme pour des violences aggravées. Dans ce clip, on entend d’ailleurs les policiers de la maison d’arrêt lui demander « d’arrêter de filmer » les lieux.

Miguel D. est notamment connu de la justice pour avoir participé à des violences et des rixes entre bandes contre les jeunes de Saint-Michel-sur-Orge. Il est la tête de pont du groupe de rap 02 Géné, qui se vante très régulièrement dans ses morceaux de participer à ces rixes. « Il joue énormément sur ses déboires judiciaires, il fait son buzz dessus » confie une source proche du dossier.

Sa sortie anticipée de maison d’arrêt, sous bracelet électronique, en mars dernier, a fait grand bruit : il en a tiré un clip surprise tourné devant Fleury-Mérogis, nommé « 18 mars ». Il a atteint les 4,5 millions de vues. « Le 30 septembre, c’est du passé », annonce-t-il fièrement, alors qu’il vient de signer chez Universal et Virgin Records. Les affaires judiciaires, elles, ne sont pas encore toutes derrière lui.

Ecrit par par Bartolomé Simon, avec Vincent Gautronneau

Voir l’article sur le site du Parisien.