“Le cabinet accompagne la famille de Simon, dramatiquement décédé à l’âge de 19 ans, durant ses études de médecine. De l’enquête en cours, nous attendons que toute la vérité soit faite, et que toutes les responsabilités pénales soient établies.” Damien Legrand
Jeudi 8 juillet 2021, Simon Guermonprez participait à une soirée d’intégration, sa toute première au sein de l’Université de médecine de Lille (Nord), où il venait d’être admis en 2e année. C’est aussi au terme de cette soirée que l’étudiant a perdu la vie, à l’âge de 19 ans : son corps a été retrouvé au pied d’un pont de l’A27, non loin du domicile familial à Chéreng, alors qu’un taxi avait déposé le jeune homme devant chez lui aux alentours de 00 h. Un mois après le drame, le père de Simon, Daniel, informait que l’enquête avait conclu à une mort accidentelle. Désormais, près d’un an après la disparition de son enfant, il fait état de deux nouvelles avancées de taille.
« Il n’y a eu aucun rapport de transmis » par l’Université
Lors d’un entretien avec la procureure de Lille, le 5 avril dernier, Daniel Guermonprez, accompagné de son avocat Me Damien Legrand, affirme être « tombé des nues ». C’est à cette occasion qu’il apprend en effet que, malgré ce que lui avait indiqué le président de l’Université dans un courrier officiel en date du 4 octobre 2021 (que nous avons consulté), il n’y avait pas eu de prise de contact avec les services de justice.
« Je tiens à vous assurer que l’Université de Lille collabore de façon étroite avec les services de police et de justice […] Il a ainsi été porté à la connaissance [du procureur] toutes les informations », peut-on lire dans la lettre de l’époque. « Or, la procureure n’était pas au courant. Il n’y a eu aucun rapport de transmis, ni de conclusions d’une enquête interne », explique Daniel. Une désillusion que partage son avocat. « A priori, l’Université n’a rien communiqué du tout. Ça rajoute aux nœuds et aux suspicions. »
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Un objectif de boire 12 seringues d’alcool
Deuxième élément, reprend Daniel Guermonprez : « C’était bien un bizutage. On a eu la confirmation que notre fils avait eu pour objectif de boire 12 grosses seringues d’alcool. » Une personne qui était avec lui ce soir-là a précisé que Simon « avait dit stop » au bout de la 8e seringue ingérée. À l’intérieur, de l’alcool pur, voire des mélanges d’alcools purs. La dose a nécessairement altéré le discernement de son fils, selon Daniel, « qui ne buvait jamais d’alcool ». Pour preuve, l’étudiant quitte la soirée prématurément, peu après 23 h, pour rentrer chez lui.
Aujourd’hui, le père de famille et son avocat veulent « que les responsabilités de tous soient établies », l’Université en première ligne. Car ils se disent loin d’être convaincus par le discours selon lequel elle n’aurait rien à faire dans l’organisation de ses soirées.
Comment est-ce possible que ces soirées à grande échelle se fassent sans que la faculté ne participe à l’organisation ? Des appartements pouvant accueillir une centaine de personnes sont loués, des hectolitres d’alcool sont achetés, ce ne sont pas les étudiants qui les financent ! La logistique est telle que la fac ne peut pas ne pas être impliquée.
« Et qui fournit les fichiers des étudiants qui sont admis en 2e année aux bureaux d’étudiants, pour qu’ils participent à la soirée d’intégration ? », interroge Daniel Guermonprez.
Une famille décidée à aller « jusqu’au bout »
Les derniers moments de vie de Simon, pour lui, sont « incompréhensibles ». Après avoir été déposé devant chez lui, Simon emprunte un chemin de campagne et se rend sur un pont, où il se prend en selfie. « Simon ne faisait pas de selfie. Peut-être que c’était un autre objectif reçu, parce qu’il n’avait pas fini celui d’avant [de boire les 12 seringues d’alcool, NDLR]… » Une hypothèse plus que probable pour Daniel, qui précise qu’il aurait pu être important pour l’étudiant de garder la face, alors qu’une nouvelle soirée d’intégration était prévue dès le lendemain.
La famille voudrait, en tout cas, que les conclusions en interne de l’Université lui soient portées, ainsi qu’à la justice. Elle ira en tout cas « jusqu’au bout », selon son avocat. Lui place une entière confiance en les services en charge de l’enquête. « La procureure nous a rassurés. On a vu qu’il y avait une vraie enquête, une plainte qui était très clairement suivie et instruite. » Daniel, lui, en contact avec des parents qui ont traversé la même épreuve ailleurs en France, ne s’attend pas à une condamnation avant au moins cinq ans. « C’est vraiment très long. »